La blessure originelle

La blessure originelle est celle de croire que nous sommes à l’origine de ce que nous vivons, subissons, recevons et ne recevons pas.

Finir par croire que nous sommes à l’origine du non Amour de soi par les autres est la déchirure ultime.
Au final quoique soit l’impact sur nous, quand nous ressentons un non-don d’amour selon notre propre définition de l’amour ( très important j’insiste), nous finissons par croire que nous ne sommes pas une personne aimable.
Alors la seule explication et théorie possible pour justifier ce comportement ou ce choix de la part d’une personne proche, très proche, censée selon nous savoir aimer c’est que cela vient forcément de nous. C’est nous le problème.

Quand nous souhaitons, espérons, attendons de plaire, d’être désiré, aimé, choisi, tout particulièrement d’une personne et que celle-ci ne fait pas ce choix nous avons le réflexe de chercher à expliquer l’origine ou la cause de cette décision et quand nous ne trouvons rien il ne reste plus que nous comme origine. Nous devenons notre propre bourreau.

Lorsqu’un membre de notre famille, nous (dé)montre de l’indifférence, de la dureté, de la maltraitance, aucune tendresse, peu d’intérêt, nous rejette, nous abandonne, nous ignore, nous critique, nous reproche d’être ainsi ou ainsi, nous quitte, ne s’intéresse pas à nous, nous trahissent, nous trompent, nous mentent, manque de considération, de respect, sont méchants… Tous ces actes, que je ne peux citer tant la liste est longue, vont générer un sentiment de non-amour et nourrir une croyance profonde et dévastatrice qui mène toujours à la même conclusion : je ne suis pas aimable parce que je ne suis pas assez ceci, cela, trop ceci ou cela.

Si par exemple personne ne s’intéresse à moi alors je ne suis pas intéressant. Si je suis rejetée alors je ne suis pas normale, j’ai un problème, ma différence ne plaît pas cela ne va pas. Si je suis abandonné alors je n’en vaux pas la peine, je n’ai pas de valeur, je ne suis pas important, précieux. Si mon compagnon me quitte pour une autre femme alors elle est forcément mieux que moi, plus belle, plus intelligente, plus que moi… Si ma mère se fâche souvent contre moi et n’est pas contente en le faisant comprendre que je peux mieux faire et qu’elle n’est jamais satisfaite alors je suis décevant, pas à la hauteur. Si mon père n’est jamais fier de moi je me sens nul et pas assez bien à ses yeux. Si tout ce que je fais est toujours remis en question et que mes choix ne sont jamais compris et accepté, j’ai l’impression que j’ai un vrai problème sans savoir réellement lequel. Si mes émotions, mes larmes sont bafouées et moquées alors je me sens faible, fragile et inadapté…
Et cetera…

Voilà des exemples de croyances qui se nichent en nous.

En donnant crédit à nos conclusions, nous en faisons notre réalité, nos convictions. Nous finissons réellement par en être persuadé.

La croyance originelle est celle qui blesse le plus. Celles des autres deviennent la notre et inversement.
Par logique et pensant en être à l’origine de tout cela, nous allons tout faire pour que cela change et donc tout faire et entreprendre pour se faire aimer, accepter, comprendre, pour satisfaire un max.
Et quand nous n’avons pas grand-chose, une miette de pain peut paraître énorme.
Combien se contentent de peu pensant alors que c’est une chance d’avoir déjà ça même si c’est pas grand chose. Ils relativisent et ne font pas souvent les difficiles. Ils souffrent et prennent souvent sur eux en secret. Ils s’empêchent d’y penser, ils ravalent ce qui coince et essayent de voir ce qu’ils ont.

Nous allons tout donner, tout tenter jusqu’à se changer même si ce n’est pas naturel. Nous allons nous remettre en question, encore et encore pour entrer dans la norme, leurs normes et leurs cases quitte à sortir de la nôtre (beaucoup ne la connaissent pas et la délaissent pensant que ce n’est pas la bonne, qu’elle est anormale, bizarre, étrange, tordue…)
Et nous aurons beau essayer, nous déborderons, nous devrons sacrifier ce morceau ou celui-ci pour passer ( souvent en force).
Nous allons nous déformer, nous travestir, faire des thérapies, répondre aux attentes, nous taire, nous faire petit et discret pour ne pas déranger, nous adapter, tout faire pour briller dans leurs yeux pour enfin être vu et reconnu, nous allons nous endurcir pour être fort, faire des choix de vie pour »réussir » selon les critère des autres et obtenir peut-être un peu de fierté ou une phrase, un mot, un geste, un sourire…quelque chose quoi. Beaucoup se transforment en mendiant de l’amour.

Ces mendiants là cherchent à déclencher quelque chose chez l’autre dans l’attente de recevoir ce qui nous manque tant.

Et quand, malgré tout cela, rien n’y change, et que même une miette de pain nous laisse sur la faim, même si nous avons essayé de tenir (vraiment nous avons essayé sur la durée), nous avons soif d’amour, nous en voulons plus. Nous sommes en train de mourir de l’intérieur, la flamme vitale s’affaiblit et s’éteint petit à petit, exténué.

Avoir survécu à la disette et s’être contenté de miettes de pain par-ci par-là a été de la survie.

Certains en osant penser cela diront d’eux qu’ils sont exigeants, jamais satisfaits et ne sachant pas se contenter de ce qu’ils ont déjà. Oser demander plus peut nourrir un sentiment capricieux et prétentieux.
Et pourtant le constat ressenti est que nous en faisons bien trop et les autres trop peu.
Il y a déséquilibre.

La seule chose qui reste, c’est cette foutue croyance sur soi qui va devenir notre fardeau, notre peste intérieure.
C’est elle qui nous déchire car finir par le croire soi-même est la pire des blessure de mon point de vue.
La seule issue possible est d’apprendre à s’accepter, s’aimer et se reconnaître à sa juste valeur seul(e). Il y a urgence à regarder autrement cette croyance ancrée en nous depuis si longtemps. Elle fausse tout.
Je note ici ce constat paradoxal et controversé qui est ne pas réussir à recevoir de certaines personnes de l’amour sincère alors que nous en sommes affamés et surtout focalisés sur des personnes répandant cette disette et incapable de nous aimer tel que nous sommes.
Il y a de quoi s’interroger non ?

Mais toi es-tu capable de t’aimer avant de demander aux autres de le faire à ta place?

L’éveil spirituel est un éveil à soi pour se voir, se regarder dans les yeux entièrement et apprendre à tout accepter et respecter tel que nous sommes naturellement ici et maintenant. C’est la vraie progression contrairement à cette manie de penser qu’il faut évoluer et changer pour être aimé.
Se délester du regard des autres est une émancipation importante certes, mais n’oublions pas que la priorité restera celle de se libérer de son propre regard inquisiteur sur soi avant tout chose.
Changer le regard sur soi et se reconnaître permet de se connaître et de s’assumer tel quel ici et maintenant tout en ayant conscience que nous changerons encore et encore au grès des expériences à venir et que rien n’est figé. La clé est de se concentrer sur la connaissance de soi dans le moment présent pour commencer à se libérer progressivement du regard des autres. Seule l’acceptation de notre impuissance à changer leur regard sur nous donne accès à cette libération. Et ce n’est pas du « je m’en foutisme », c’est du détachement et du discernement « entre eux et moi » tou en respectant leur choix et leur libre-arbitre. Nous sommes et resteront impuissants sur ce qu’ils voient, pensent , imaginent et projettent. Par contre nous avons toutes et tous le pouvoir de changer notre propre regard sur soi-même et les autres.

S’élever à l’échelle de l’âme permet de comprendre la différence de conscience et de pratique de l’amour.
L’amour n’est pas une pensée.
Réaliser et mesurer cette différence de maturité sur la pratique de l’amour permet de revoir sa copie d’une vision linéaire qui viserait à dire que nous sommes tous égaux dans le sens où nous devrions toutes et tous savoir aimer de la même façon. Ou comme nous plutôt. En réalité, et sans le savoir, notre seule référentiel étant nous-même, c’est de notre façon d’aimer dont nous parlons et pas forcement la leur.

Notre normalité est une différence pour autrui mais sa normalité à lui est une différence pour nous en retour.

Vu ainsi, peut-être que tout l’amour non reçu n’est pas lié à nous directement.
C’est l’objectif d’un éveil que de voir plus grand pour aborder les choses autrement et changer de prisme.
L’échelle de l’âme permet de comprendre le décalage d’évolution existant entre les êtres et attendre d’eux certaines aptitudes serait trop leur demander. Ils ne savent pas faire.
La capacité d’amour évolue au fil de nos incarnations et à chaque fois nous en revenons pour aller en chercher en elles une version plus aboutie.
L’amour passe par toutes les étapes, toutes. Et quand des étapes n’ont pas été encore franchies, il est impossible de les devancer et de savoir faire autrement puisque cet autrement n’est pas encore arrivé.
Cela ne veut pas dire que vous ne les avez pas franchies vous-même. Peut-être savez-vous aimer comme d’autres ne le savent pas encore et que d’autres savent aimer comme vous ne le savez pas encore. La transmission n’a de sens que dans le décalage et cela n’a rien à voir avec le potentiel de chacun. 
Il n’y a rien de supérieur ni d’inférieur ici. Il n’y a pas de moins bien ou mieux.
Il y a des différences de parcours, de distances parcourues qui expliquent tant de choses encore incomprises.

Nous sommes tous aimables. Je ne peux supporter l’idée de dire ou de priver quiconque du don de la vie et de son amour qui est universel et inconditionnel. Ce que chacun fait de sa vie est son libre-arbitre et correspond exactement à une expérience qui va l’amener par la suite à grandir et à aimer autrement.

Adeline Ferlin

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