Le piège de l’urgence dans la guérison des blessures existentielles et émotionnelles

Le piège de l’urgence dans la guérison des blessures existentielles et émotionnelles

C’est l’un des facteurs les plus vendeurs dans le développement personnel et la guérison intérieure.
Le rapide, le saut quantique, la fulgurante… Aller vite est le mot d’ordre quand la prise de conscience se manifeste.

Quand l’évidence d’en finir, de passer à autre chose et d’opérer un changement parce que plus possible de vivre ainsi, l’urgence est d’y être déjà, en quelques mouvements seulement.
Quand la décision est prise, un des premiers réflexes est la quête du résultat rapide amenant à la grande victoire sous-entendant un échec que si c’est long malgré les petites victoires.
Le milieu de la guérison profonde et existentielle est victime de sa propre urgence.
Aller vite devient par définition “magique » et chercher la solution miracle explique la quête effrénée de l’élixir de la transformation « instantanée » face à ce besoin d’urgence.

Malgré avoir compris et saisi intellectuellement ce qui devait évoluer et changer, beaucoup réalisent que le résultat final attendu ( celui qui est projeté) n’est toujours pas là, en tout cas pas aussi vite qu’ils le pensaient.
Toujours bloqué et en difficulté face à certaines situations de la vie, poser l’acte en adéquation avec ce qu’ils ont conscientisé n’est pas aussi évident, facile et aisé. Pourtant tout semble si clair et évident. L’évidence fait souvent penser que ce sera facile. C’est faux. La difficulté vient de la nouveauté et non d’une incapacité et ce n’est pas parce que l’esprit a compris ce qui devait changer que les mouvements qui vont avec font se faire rapidement. C’est un leurre.

Se sentant en échec et déçus, ils ont parfois la sensation de n’avoir rien compris jusqu’à se sentir nuls. Des sentiments de culpabilité et/ou d’injustice peuvent se manifester alimentant une forme de colère envers eux-mêmes, les autres ou simplement envers la vie.
Dépités, dégoûtés et contrariés, ils ne comprennent pas pourquoi ils en sont encore que là et sont tentés de tout arrêter pensant que tout ce qu’ils ont entrepris jusqu’alors à rien. L’envie de baisser les bras est là.
Découragés la plupart du temps, cela ne va pas aussi vite qu’ils le souhaitaient et croyaient.

Sauf que la guérison ne se pense pas, elle se pratique et c’est ainsi qu’elle nous enseigne qui elle est. Pas autrement.

J’arrive souvent à ce stade-là du processus dans mon accompagnement.
Les blessures profondes sont encore et toujours là. Malgré les progressions, insuffisantes à leurs yeux, la douleur est palpable et les réflexes qu’ils ne supportent plus sont encore là. Encore bloqués, le passage à l’acte s’avère plus complexe qu’il n’y paraît.

S’estimant en échec face à de fausses croyances sur le processus de guérison, ils peuvent tout remettre en question, de leurs propres capacités au processus même de la transformation intérieure.

Les premières inquiétudes exprimées lorsque je les rencontre sont directement liées au temps et comment faire pour avoir du résultat rapidement. Ils n’ont plus le temps. C’est urgent.
Exemple : « Combien de temps ? Cela fait des années que je travaille sur moi, je suis épuisée, je n’en peux plus, que dois-je faire ?”
Et c’est le sujet que je désamorce en premier.
C’est aussi pour cela que je vous en parle aujourd’hui par le biais de ces mots.
Je les sens dans une grande incompréhension et détresse. L’état d’urgence a empiré. Les accueillir dans cet état d’urgence est primordial et leur annoncer qu’il leur faudra se réconcilier avec le temps pour une guérison telle que celle-ci permet d’accueillir leurs résistances et croyances.

Le temps devient l’élément central à travailler pour aborder la suite.

Dans ces moments-là , j’ai la sensation de leur saper le moral en ne leur disant pas ce qu’ils veulent entendre. Mais je ne peux pas mentir. Je leur dois la vérité et il est impératif de respecter leur libre-arbitre en leur expliquant de quoi il s’agit et surtout ce que ce choix implique réellement. Ils doivent savoir dans quoi ils s’embarquent pour pouvoir choisir et assumer pleinement leur choix qui est celui de leur évolution. La libération émotionnelle ce n’est pas ce que vous croyez. Se transformer ce n’est pas rapide. Et ainsi de suite…La phase de déconditionnement sur la guérison commence.

Sous-estimant souvent leurs petites progressions et cherchant la « grande victoire » ( qui varient en fonction de leurs attentes elles-mêmes conditionnées par leurs propres croyances sur la guérison et l’état dans lequel ils devraient être), ils expriment une déception notoire quant au temps passé pour si peu de résultats : « Tout ça pour ça ? ».
L’exigence est reine en son royaume car vouloir du résultat rapide sans les efforts qui vont avec sur des sujets aussi profonds et structurants est selon moi incohérent. Tout est une question d’échelle. Plus c’est profond plus c’est long. Plus c’est douloureux plus c’est dur. Trop dur et trop long. Alors forcément ils finissent par croire que c’est eux-mêmes le problème sinon ils y seraient déjà arrivés.

Et à chaque fois cela me fait mal au ventre et de la peine que de les voir penser cela d’eux.

Le problème est ce que l’on dit de la guérison et toutes les croyances sur elle. L’état d’urgence de départ fausse la suite du processus.

Elle se pratique et ne se consomme pas. Elle est douloureuse, inconfortable et désagréable. Il est normal de vouloir que cela cesse vite. À qui peut-on reprocher cela ? Personne.
Il est vrai qu’elle demande efforts, concentration, persévérance, pratique, entraînements, assiduité, régularité, présence, répétitions et pour tout cela, il faudra du temps et encore du temps.
La guérison est un vrai travail personnel. Elle n’est ni un hobby, ni une activité fun pour passer son temps. Et il y a du résultat car l’effort paye toujours. La joie et la paix ressenties seront tout aussi profondes. Contrairement aux croyances, elles s’installeront tout autant progressivement au fil des avancées.

Elle demande beaucoup d’entraînement jusqu’à ce que le mouvement intentionné au départ( grâce à la prise de conscience) prenne forme ( toujours progressivement) et devienne naturel dans sa vie de tous les jours. Remplacer un réflexe par un autre (tout dépend du réflexe) peut prendre des mois, des années, une vie, des vies. 
Exemple: Si mon réflexe est celui de me “sacrifier pour les autres” et donc de m’oublier et de m’abandonner au profit des autres, et qu’en plus en osant ne pas m’oublier, je pense être égoïste ou abandonner les autres, ce chemin va devenir un marathon dont il est impossible de quantifier sa durée.

Et finalement quelle importance ? Ici ce n’est pas une course à la rapidité même s’il est urgent d’opérer ce changement. C’est une discipline de chaque instant, une somme de petites victoires qui un jour devient grande et arrive à maturité. C’est un chemin PROGRESSIF.
Petit à petit, mais sûrement. La finalité n’est plus de le penser mais de l’incarner et chaque petite progression a besoin de temps pour s’ancrer dans la matière. Matérialiser un changement est le signe de la guérison véritable. Les petites victoires matérialisent que le travail est enclenché et en cours et non l’inverse. Apprendre à les accueillir et voir en elles ce qui se trame deviendra essentiel pour tenir bon.
C’est un travail de besogneux et de fourmis.

Les blessures existentielles sont ancrées au plus profond de nous. Elles sont aussi les plus douloureuses et les plus difficiles à guérir. Elles sont loin, même très loin d’être des petits bobos ou des éraflures qui se guérissent vite ou assez vite. La logique et le paradoxe veut que ce soit justement cette douleur si profonde qui explique l’état d’urgence et ce besoin d’aller vite.

Elles font parties de nous et nous les incarnons dans nos mouvements de tous les jours. C’est tout un apprentissage pour se déconditionner d’un réflexe qui représente jusqu’alors notre version la plus aboutie mais qui a aussi atteint sa limite. C’est ainsi grâce à elle (cette limite) que la nouvelle version prend tout son sens. Sans elle impossible de conscientiser sa future évolution.

Exemple pour illustrer un changement de mouvement: imaginez que vous pensiez faire du vélo à l’endroit et un jour vous réalisez que vous pédalez à l’envers. Vous décidez alors d’apprendre à pédaler à l’endroit mais vous n’y arrivez pas. Malgré toute votre bonne volonté, votre 1er réflexe est celui de pédaler naturellement à l’envers. Il vous faudra corriger ce réflexe en vous entraînant beaucoup sans relâche pour qu’un autre s’installe à la place.

De plus, beaucoup réalisent la manière dont ils se traitent ou se maltraitent dans cet apprentissage de chaque jour. Apprendre à s’accompagner dans leur propre transformation deviendra une évolution majeure pour se sentir enfin légitimes dans l’accompagnement à l’autre. En vivant cette expérience intérieure, ils se sentent illégitimes vis à vis des autres puisqu’ils se rendent compte qu’ils disent et font avec les autres ce qu’ils n’arrivent pas à pratiquer avec eux-mêmes. Le changement est là également.

Il n’y a qu’en le vivant soi-même, de A à Z, que l’on comprend alors un jour ce que signifie guérir et par quoi il faut passer pour y arriver et pourquoi pas transmettre sa propre expérience.

*Petit clin d’oeil: les planètes de guérison profondes sont des planètes lentes. 

Adeline Ferlin

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